Le Troubadour Gavaudan,
les Béarnais, les Gascons et les Provençaux.
Chanson de Croisade
Le vers 58 de cette Chanson porte la première mention connue du mot Bearns désignant les Béarnais parmi les croisés appelés à aider le roi de Castille contre les Musulmans. Pour A. Jeanroy, ce texte peut être daté de 1195.
Toute question linguistique mise à part, il est remarquable que Béarnais, Gascons et Provençaux sont nommés distinctement parmi les peuples qui disaient « oc », près d’un siècle avant la première attestation de l’expression si peu linguistique de « langue d’oc », dans un acte notarié dressé à Lagny, près de Paris, en 1291.
Mais cette mention des Béarnais parmi les croisés n’a rien d’étonnant, quand on sait leur rôle dans la prise de Jérusalem en 1099, avec à leur tête leur vicomte Gaston IV. Et pendant tout le début du XIIe s., ils devaient encore guerroyer avec le roi d’Aragon contre les Musulmans. On sait par ailleurs que les “Français” (du nord) de l’armée croisée appelaient du nom latin de Provinciales tous ceux que commandait le comte de Toulouse Raymond de Saint-Gilles, qu’ils fussent Bourguignons, Gascons, Goths (nous dirions aujourd’hui “Languedociens”) ou autres (cf. le livre écrit avec Guilhem Pépin La “Langue d’oc” ou leS langueS d’oc ?, p. 70). Le troubadour Gavaudan, originaire du Gévaudan (notre Lozère) montre au contraire qu’un homme du Midi avait une idée plus précise des “nationalités” méridionales.
Pour revenir à l’écrit, dans les documents anciens du Béarn ou d’ailleurs, je n’ai jusqu’ici rencontré un mot nommant les Béarnais ou leur langue (en principe, bearnes ou biarnes) que dans les Chroniques romanes des comtes de Foix d’Arnaud Esquerrier et Miégeville (1461), pour sauter ensuite à plusieurs mentions des Bearnes dans le Livre des Syndics des États de Béarn à partir de novembre 1512 et celle du bearnes comme langue dans les registres des États de Béarn, le 1er mars 1533.
Mais, ironie du sort, Andriu de Gavaudan est le pseudonyme de l’occitaniste André Bianchi, auteur en 2005, avec son collègue Maurice Romieu, d’une Gramatica de l’occitan gascon contemporanèu de 578 p., à usage universitaire, qu’ils ont purgée soigneusement des que énonciatifs qu’en bons Languedociens ils n’arrivent pas à maîtriser. Même Jacques Taupiac, occitaniste mais Gascon, leur en fit ouvertement le reproche dans un article de la revue Reclams.
Et ce Gavaudan prépare ainsi les enseignants de l’« occitan de Gascogne »...
13 et 14 juin 2012
Jean Lafitte
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http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k16042j/f543.image
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