mardi 24 janvier 2012

Réponse aux réactions des lecteurs.

Réponse aux réactions des lecteurs.

lundi 23 janvier 2012 par Jean Lafitte


Je tiens à remercier les personnes qui ont réagi à la suite de mon constat attristant d’il y a quinze jours sur l’absence totale du béarnais dans les vœux des Béarnais publiés le 2 janvier par la presse paloise.

Certes, la réaction de M. Dominique Bidot-Germa a pu paraître bien vive, mais je le remercie de m’avoir ainsi donné l’occasion de faire à mon tour de nombreuses mises au point sur les graphies du béarnais, la moderne et la classique, ou « occitane ».

Je vais en quelques mots répondre à une petite question soulevée par deux des intervenants, faire une mise au point sur l’efficacité des Calandretas et des manifestations festives, puis je présenterai brièvement l’étude sur la graphie qui sera téléchargeable.

Peyo et L’Ours du bois s’interrogent sur beroye ou beroje. Voici ce que j’en pense : avec l’aide de l’Atlas linguistique de la Gascogne (ALG), j’ai dressé une carte des régions gasconnes qui disent j ou y ; comme pour anade avec un seul -n- (cf. mon étude présentée plus bas), on dit y dans le coin Sud-ouest du domaine gascon, comme adossé au Pays basque (qui dit yauna), dernier refuge de l’aquitain de nos ancêtres communs ; comme le son y est aussi le latin d’origine, je pense que c’est la prononciation la plus ancienne et donc la plus « gasconne » ; le j est venu après. Mais si l’on écrit j en disant qu’il se prononce j ou y selon les lieux, comme le fait la graphie occitane, cela ne règle pas le sort des j qui en un même lieu, restent j tandis que d’autres sont y, et cela au sein d’un même mot : c’est inextricable ; la seule solution praticable est d’écrire j ou y selon la prononciation réelle du lieu ; de toute façon, cela ne gêne absolument pas la compréhension et comme l’a dit un prof. de la Sorbonne, « au moins, on sait comment vous prononcez ».

Pagahosurós a pris l’affaire sur le ton plutôt sympathique de reproches ironiques ; je lui ai répondu personnellement par un message amical. Ici, j’observe que la réussite dans la vie des anciens de Calandreta n’est pas due à l’enseignement du béarnais, mais à plusieurs facteurs : sociologiquement, ce sont pour la plupart les enfants de couples instruits et plutôt des classes moyennes ; l’enseignement se fait à petits effectifs et avec des méthodes pédagogiques favorables, mais qui ne sont pas propres au béarnais ; et le bilinguisme précoce peut se faire dans d’autres langues que le béarnais. De toute façon, le résultat social pour la vitalité actuelle de la langue est nul. Quant aux Carnaval, HestivÒc et autres manifestations largement subventionnées, c’est du « circences » (jeux de cirque que réclamait le peuple de Rome selon Juvénal) où l’on affiche des banderoles en béarnais, mais difficiles à lire avec leur graphie occitane pour initiés, et où des initiés parlent dans des micros : c’est de l’ordre des villages de Potemkine (explications sur Google si nécessaire).

Bien que je n’ai pas mis en cause la graphie occitane dans mon texte d’il y a quinze jours, M. Bidot-Germa en fait le thème principal de sa réaction. Mon étude ne répond qu’à cela, car les précisions sur la souveraineté du Béarn ne concernent pas mon propos. Je montre, avec tous exemples et références utiles :

1 - que la graphie béarnaise autochtone n’a jamais été enfermée dans un corps de règles, mais a consisté à s’adapter sans cesse à la langue parlée qui évoluait ;

2 - qu’il est peu vraisemblable qu’on ait un autographe des seigneurs de Béarn, des Moncade à Henri IV, qui aient envoyé des vœux de bonne année en béarnais et que s’ils l’ont fait, la notation « bona annada » est tout à fait invraisemblable ;

3 - que d’après la prononciation observée par les enquêteurs de l’ALG, seule est valable la prononciation de boun(e) anade en Béarn, boun(e) anade à Bayonne et dans le Bas-Adour ; or un article de la presse paloise de samedi 7/dimanche 8 janvier annonce que l’Institut occitan met à la disposition du public 30 000 cartes postales de « Bonaannada » gratuites, en précisant aussitôt « prononcer boune annade ». S’ajoutant aux « 1 500 affiches diffusées en Aquitaine et Midi-Pyrénées », cette opération publicitaire menée aux frais du contribuable montre malheureusement aux rares initiés soit l’ignorance des personnels de cet Institut quant aux prononciations en domaine gascon, soit, pire encore, une manœuvre pour effacer des spécificités de la langue gasconne et béarnaise en vue de la soumettre au modèle toulousain. Je n’ose pas penser que M. Bidot-Germa cautionne cette entreprise de négation de la diversité linguistique des langues d’oc, alors que, face au français national, le mouvement occitaniste ne cesse d’invoquer cette diversité au profit de l’« occitan ».

4 - que la graphie occitane n’a jamais eu pour objet de rétablir la graphie béarnaise médiévale, mais d’adapter au gascon les règles languedociennes.

Mon étude a pour titre « Bona anada, M. Vidòt-German, Boune anade M. Bidot-Germa », chaque forme étant homogène en graphie, l’une classique, l’autre moderne.

Bonne lecture !



- Par Jean LAFITTE

Pau, le 19 janvier 2012

lundi 23 janvier 2012

Les vœux des Béarnais : « béarnais » ou « occitan », langue morte


Les vœux des Béarnais : « béarnais » ou « occitan », langue morte

lundi 9 janvier 2012 par Jean Lafitte


Amis d’Alternatives Paloises, avez-vous jeté un coup d’œil sur les vœux de nouvel an formulés par des lecteurs et publiés par nos quotidiens la République et l’Éclair de lundi dernier 2 janvier ? Pour le curieux de sociologie, il y a matière à observation et réflexion...

Personnellement, mon engagement pour la langue gasconne et béarnaise de mes ancêtres me pousse à y chercher des traces de cette langue dans une expression généralement spontanée, loin des réponses orientées par les subtiles questions des sondeurs ou par les calculs conscients ou non des sondés.

Je l’avais fait pour les messages d’amoureux de la St-Valentin 2004 et pour ceux des vœux du Nouvel an 2005 et en avais rendu compte dans ma thèse : pour la St Valentin, sur 192 messages publiés, 190 étaient en français, un en italien et un seul en béarnais, en graphie béarnaise traditionnelle ; et pour le Nouvel an, sur 229 messages, un seul en béarnais, dans cette même graphie ; un autre en français s’achevait par un Adichatz, qui mêlait ch traditionnel et la finale -tz de la graphie occitane.

En 2012, la formule a deux fois plus de succès, car après élimination de 7 doubles que j’ai détectés, j’ai compté 445 vœux, dont plusieurs séries émanant d’un seul signataire. Or le seul qui ne soit pas en français est... en italien, p. IV, col. 1. Donc aucun en langue romane du pays, qu’on l’appelle du nom de « béarnais » qu’elle tient depuis 500 ans, ou du terme générique d’« occitan » issu de la loi Deixonne du 11 janvier 1951, abrogée depuis le 15 juin 2000. Aucun non plus en langue basque, malgré un lectorat important en Soule.

Parmi les destinataires nommés, les noms de famille béarnais sont assez nombreux : Palengat, Cazalet, Maunas, Serrot , etc. Mais un seul prénom est noté en béarnais, Yan, p. VII, col. 3 ; aucun prénom proprement gascon ou béarnais comme Guilhem ou Maylis, mais j’ai renoncé à compter les prénoms de jeunes directement issus des séries télévisées...

Un destinataire est nommé Cap à Cap, qui évoque peut-être l’expression béarnaise cap e cap, soit « tête à tête » ; deux autres sont des noms de groupes, Lous Esbagats du Luz et L’Arriu de Lées, écrits en graphie traditionnelle du Béarn.

Mais même l’envoi A tout [sic] les Béarnais, p. V, col. 4, est en français...
Chez les signataires, on trouve quelques noms d’allure béarnaise : Mamie Chicotte, Manicou, Miquitou, Pascalou, Patou, Pirou, Petitou, Lilou et peut-être Nizou ; et surtout Lou Baylet (p. II, col. 5) et Pierre Couartou, p. III, col. 5).
Mais on n’envoie plus ni pots, ni poutous ni poutines, plus que des bisous (avec quand même la finale diminutive ou qui vient des langues d’oc !).

Si l’on considère qu’une langue est vivante quand on l’emploie spontanément en toutes sortes de circonstances, et notamment dans la conversation familière, on est bien obligé de constater que la langue béarnais ne l’est plus. Où sont donc passés les anciens élèves de l’enseignement de l’« occitan » dispensé depuis des décennies par l’école publique ou les écoles Calandretas, fondées il y a 32 ans ?

On a vanté les bienfaits du bilinguisme, mais on le pratique aussi avec l’anglais et l’espagnol, langues vivantes que les élèves auront l’occasion de pratiquer.

Tout le ramdam fait autour de l’« occitan », les affiches « Bona Annada » au lieu du béarnais « Boune Anade », et les panneaux de signalisation urbaine en occitan, n’est-ce pas un bluff éhonté de la part de ceux qui en vivent sur fonds publics ? Il serait temps que les responsables de l’argent des contribuables en prennent conscience et réorientent les crédits culturels vers des actions plus efficaces pour la langue patrimoniale du Béarn !


- par Jean Lafitte

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